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« Le Lambeau » est un récit autobiographique de 510 pages. L'auteur en est Philippe Lançon, journaliste à Libération et à Charlie-Hebdo. L'écrivain ménage le suspense. Il évoque un attentat mais il faut attendre la page 58 pour qu'on sache de façon claire qu'il s'agit de l'attentat de Charlie-Hebdo. Philippe Lançon en effet a eu le malheur de se trouver au milieu de cette conférence de rédaction rigolarde, le 7 janvier 2015, quand ont surgi les tueurs. Philippe avait été laissé pour mort, les bras criblés de balles et le tiers inférieur du visage complètement déchiqueté. « Blessé de guerre » est la case dans laquelle la victime a été rangée par les sauveteurs. Tout au long du livre, Philippe Lançon raconte l'attentat - « Deux jambes noires ! » c'est tout ce qu'il a vu des frères Kouachi -, le transfert à la Pitié-Salpétrière, la reconstruction -moult et moult opérations - , le retour progressif et difficile à la vie en quelque sorte. L'auteur ne cherche pas à ce que le lecteur s'apitoie sur son sort. Ce n'est pas du voyeurisme que de le lire. On est au plus proche de lui. Dans sa chambre où il souffre le martyre. Au bloc opératoire qui lui devient familier. On fait connaissance avec sa famille, avec les femmes qu'il a connues, avec ses amis, avec sa chirurgienne plastique, avec ses infirmières, avec ses visiteurs – passage consacré à François Hollande, alors Président de la République-, avec ses gardes du corps en permanence à la porte de sa chambre. L'écriture est fluide. On sent que sur son lit de souffrance l'écrivain a eu le temps de peaufiner son texte, d'évoquer l'issue fatale à la façon de Baudelaire : Ô mort ! Appareillons ! L'auteur fait preuve d'une connaissance encyclopédique. Il passe aisément de la mythologie grecque et latine à la littérature française et étrangère. Il fait des incursions dans le cinéma, la peinture et dans les arts en général. Il n'hésite à puiser dans ce large creuset pour renforcer et étayer ses métaphores et ses comparaisons. Pour dire sa vie tout court... Je garde pour moi la note que j'attribue à ce livre. Comme je ne dévoile pas le secret de la chirurgie plastique qui a permis à « la gueule cassée » de retouver forme humaine. Progrès de la médecine et miracle de la science... Ce livre pourrait être étudié par les étudiants des sphères de la psychiatrie freudienne tant l'auteur fait référence à ses aïeux, à ses parents, tant il raconte les rêves qu'il a faits, avant ou après l'attentat... (Jean-Paul S.)

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